jeudi 11 février 2021

Un peu de romance

Joie et bonheur, voici que nous arrive la Saint-Valentin, fête des amoureux ô combien sincère et dénuée de toute dimension commerciale ! Que dites-vous ? "Sarcasme" ? Je ne suis pas romantique pour un sou ? Soit. 

Car voyez-vous, si on s'en tient au sens originel strict, "romantique" tient tout autant de l'horticulture que de la fidélité au sentiment amoureux. À la fin du XVIIème siècle, le français emprunte à l'anglais son "romantic", "qui a trait aux sentiments et aux idées provoqués par la lecture d'un roman", mais le mot sera employé avant toute chose pour décrire les jardins et paysages. Watelet, dans son Essai sur les jardins (1774), définit trois caractères à la décoration des jardins : le pittoresque, le romantique et le poétique. À cet époque, le mot s'oppose à "romanesque", "qui a le caractère merveilleux et chimérique du roman". 
En 1781, les Rêveries de Rousseau hésitent entre les deux emplois. 

À la fin du XVIIIème siècle, l'adjectif se rapproche encore de romanesque, ainsi que de "sentimental" dans l'univers de la description du voyage. On lui attache bientôt le mystère, l'imagination et la mélancolie. Le mot serait cependant tombé en désuétude s'il n'avait pas trouvé une nouvelle vitalité venue de l'allemand "romantisch", qui n'a pas grand chose à voir, son sens le rapprochant de "qui a trait à la littérature chrétienne médiévale", sens dans lequel l'emploient Hugo et Mme de Staël - la dimension littéraire du terme vient donc de l'allemand. Mais nous retournons de l'autre côté de la Manche dans les premières années du XIXème siècle pour y trouver le sens moderne, celui d'artiste partisan du romantisme, qu'on attache tout d'abord aux écrivains faisant référence à William Shakespeare, puis à tous les auteurs tournés vers l'Angleterre. Vers 1837, romantique prend le sens attesté de "personne se conduisant selon les codes du romantisme", et nous voilà en route pour le sens moderne. 

Entre l'Angleterre et l'Allemagne, la réputation caricaturale du Français comme intrinsèquement romantique est donc bien mise à mal. Sans parler du Suisse, avec son "romand" qui n'a rien à voir, mais aurait peut-être voulu tout de même avoir sa part à l'avènement d'une notion aujourd'hui si centrale. 



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